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LA THÉORIE DE L'HISTOIRE AU MIROIR DE LA LETTRE. CICÉRON, AD FAMILIARES, 5,12.

La longue lettre qui nous intéresse a probablement été écrite en avril 55 (1) et est adressée par Cicéron à son ami Caius Lucceius. Lucceius a entretenu avec Cicéron une amitié complexe et parfois tumultueuse, mais toujours solide et durable. Préteur en 67, il a été, en 60, candidat malheureux au consulat en compagnie de César dont il a financé la campagne. À la suite de ce coûteux échec, il s'est retiré de la vie politique et ne se consacre plus qu'à l'histoire. On sait, par la lettre elle-même, qu'il est en train d'achever "l'histoire de la guerre sociale et de la guerre civile" (2) qui l'a suivie.

Huit ans après son brillant consulat de 63, Cicéron se trouve en 55 dans une situation relativement difficile. Exilé en 58, revenu triomphalement à Rome en 57, l'ancien consul n'a plus de pouvoir réel et est toujours aux prises avec son ennemi juré le tribun Clodius. Il a dû, en 56, se rapprocher des triumvirs dont il avait pourtant condamné les projets (3); contre son gré, il se tourne déjà vers une vie plus intellectuelle et plus contemplative (4). Contraint depuis plusieurs années à défendre et à justifier sa politique des années 63-62 (5), il revient sans cesse vers le passé et désire lui donner en quelque sorte une forme définitive et pour ainsi dire officielle.

En avril 55, il s'adresse donc à son ami l'historien Lucceius pour lui demander d'écrire l'histoire de son consulat et des événements qui ont suivi jusqu'à son retour d'exil, sans l'intégrer dans "la trame des autres événements" (6). Ce que Cicéron réclame ainsi, c'est en fait une monographie; comme (Callisthène pour la guerre de Phocide, Timée pour celle de Pyrrhus, Polybe pour celle de Numance" (7), Lucceius pourrait peut-être séparer "le récit de la conjuration de celui des guerres extérieures" (8) et le mettre à part du grand ouvrage où il embrasse "dans leur suite continue, les événements de l'histoire" (9). S'il accepte, Cicéron lui fournira tous les matériaux nécessaires; s'il refuse, il sera contraint d'écrire lui-même sa propre histoire, ce qui n'est satisfaisant, ni pour lui, ni pour la crédibilité historique ; dans ce cas en effet

bien des gens... vous critiquent et disent que les hérauts des jeux gymniques agissent avec plus de modestie, eux qui, après avoir couronné les autres vainqueurs, […] ont recours à la voix d'un autre héraut, pour ne pas proclamer eux-mêmes leur propre victoire (10).

Flatterie et vanité.

À la lecture de la lettre, on est immédiatement frappé par le mélange, presque insensé, d'orgueil et de flatterie qui en est une des composantes essentielles. Pour décider son correspondant, Cicéron en effet ne lui ménage pas les compliments :

C'est que... la qualité de ce que tu écris, bien que je m'en fusse toujours fait une très haute idée, a dépassé mon attente et m'a à ce point séduit, enthousiasmé, que j'ai voulu voir au plus tôt le souvenir de mes actions confié à un monument qui fût ton œuvre (11) […] Je ne profiterai pas seulement de ton talent, comme Timoléon de celui de Timée, ou Thémistocle de celui d'Hérodote, mais encore de ton autorité d'homme de grande réputation, [...] ainsi je n'aurai pas seulement en toi un héraut comme Alexandre, étant venu à Gigée, dit qu'Homère l'avait été pour Achille (12).

On le voit, Achille, Homère, Alexandre, Timoléon, Timée, Hérodote et Thémistocle et, quelques lignes plus haut, Agésilas et Xénophon, Callisthène, Pyrrhus et Polybe (13) sont ici convoqués sans vergogne ! Même si l'on tient compte des principes de la rhétorique cicéronienne, l'hommage dithyrambique à l'auteur pressenti révèle ouvertement l'extraordinaire vanité du héros potentiel (14).

C'est qu'un vif sentiment d'avoir mérité la gloire (15) conduit Cicéron à désirer ardemment la célébrité et l'immortalité qui doivent normalement la suivre:

Je brûle d'une envie extraordinaire, et qui, je le pense, n'a rien de blâmable, de voir mon nom illustré et rendu célèbre par tes écrits. [...] L'idée que la postérité parlera de moi m'emporte à je ne sais quels rêves d'immortalité (16).

La gloire et l'immortalité.

Mais son désir est impatient, et Cicéron ne s'en excuse probablement que pour la forme (17): c'est tout de suite, et en tout cas de son vivant, qu'il veut jouir d'une gloire si chèrement payée, si durement acquise et si totalement méritée:

J'éprouve [...] le désir de recueillir de mon vivant les fruits que doivent porter l'autorité de ton témoignage, les marques de ta sympathie, le charme de ton talent (18).

Et plus bas:

Je suis dévoré de cette impatience fébrile dont je te parlais en commençant : je brûle de voir mes contemporains apprendre par tes livres, de mon vivant, à me connaître, et de cueillir moi-même, durant ma vie, les fruits de ma modeste gloire (19).

L'élan qui le porte et justifie sa requête est ainsi curieusement teinté d'une sorte d'épicurisme qu'on retrouve encore au moment où Cicéron évoque le plaisir qu'on peut éprouver à contempler "sans aucun chagrin personnel les malheurs d'autrui", voire à "se rappeler, dans la sécurité, les douleurs passées" (20).

L'honnête évocation d'un plaisir à venir et le sincère aveu d'une "impatience fébrile" ne sont pourtant sans doute qu'un procédé de rhétorique évidemment destiné à attendrir le destinataire; à travers l'écriture et le récit d'un authentique historien, ce que Cicéron recherche en effet, ce n'est pas seulement une jouissance purement vaniteuse, c'est aussi, et en outre, dans une conception cette fois plus stoïcienne qu'épicurienne, ce qu'il appelle ailleurs "la vraie gloire" (vera gloria). La vraie gloire ne peut en effet être donnée et garantie que par les boni (21) et ce qui nous semblait tout à l'heure pure flatterie n'est peut-être que l'expression d'une préoccupation purement philosophique :

Je ne profiterai pas seulement de ton talent, [...] mais encore de ton autorité d'homme de grande réputation et de haut rang, qui s'est fait connaître et apprécier parmi les meilleurs dans les circonstances politiques les plus graves: ainsi je n'aurai pas seulement en toi un héraut comme Alexandre, étant venu à Gigée, dit qu'Homère l'avait été pour Achille; on verra aussi dans ton ouvrage l'important témoignage d'un homme illustre et d'un grand homme. J'aime en effet cet Hector de Névius qui n'est pas seulement heureux qu'on chante sa gloire, mais, ajoute-t-il, "qu'elle soit chantée par un homme glorieux lui-même" (22).

Pour Cicéron, comme pour beaucoup d'intellectuels romains, l'éternité du souvenir et l'immortalité ne peuvent en effet s'acquérir que par l'histoire, et l'écriture est plus durable et plus solide que le monument commémoratif ou triomphal (23): un seul texte de Xénophon a plus fait pour la gloire du roi Agésilas "que toutes les images peintes et les statues du monde" (24).

La vraie gloire, celle qui assure l'immortalité et une éternité de bon aloi, ne peut donc être acquise que par le récit historique, et l'histoire doit être écrite par un homme de bien, c'est-à-dire par un homme "capable, en s'acquittant de cette tâche, d'immortaliser aussi son nom" (25). Ainsi, ce qui apparaissait comme une flatterie purement rhétorique était aussi la sincère explication d'un choix, ce qui semblait vanité était aussi le désir de montrer l'intérêt historique des événements vécus par Cicéron.

La lettre à Lucceius porte donc le reflet de la théorie de l'histoire qui se met à ce moment en place dans l'esprit de l'orateur; elle apparaîtra en effet dans le de Oratore, qui date précisément de 55, et elle sera reprise et précisée trois ans plus tard, en 52, dans le de Legibus.

La théorie cicéronienne de l'histoire (26).

Construit sur le modèle des dialogues platoniciens, le de Oratore met en scène Antoine et Crassus, deux grands orateurs de la génération précédente, et quelques amis (27) qui discutent ensemble de l'art oratoire. C'est dans le livre deux que prend place une digression à l'occasion de laquelle Antoine développe sa conception de I'histoire (28). Séparant en fait le contenu et la forme, il distingue, dans le processus de rédaction historique, trois éléments fondamentaux : les lois générales ou fundamenta, la construction du récit ou aedificatio, la qualité du style ou exornatio (29).

Les fundamenta, ou lois générales, peuvent se ramener à deux formules très simples : d'une part "ne rien oser dire de faux", d'autre part "oser dire ce qui est vrai" (30). Connus de tous, ces deux principes fondamentaux (31) sont la règle essentielle de l'histoire (primam historiae legem) et construisent les fondations sur lesquelles se dresse l'édifice du récit historique, constitué lui-même par les faits à rapporter et par l'art de les exprimer.

L'aedificatio (32) impose d'abord de présenter les faits dans l'ordre de leur apparition et de décrire les lieux dans lesquels ils se sont produits. Pour chaque fait, l'historien devra indiquer quelle fut sa préparation, comment se fit son exécution, quels furent les résultats et les conséquences ; il n'omettra jamais de préciser les causes et pourra toujours donner son opinion personnelle; il complétera enfin son récit par une présentation des hommes, qui décrira au besoin leurs caractères et leur vie et racontera le détail de leurs actions:

Pour ceux-ci enfin, que non seulement il [l'historien] rapporte leurs faits et gestes, mais aussi, au moins pour ceux dont le nom jouit d'une réputation particulière, qu'il en peigne la vie et Je caractère. (33)

L'exornatio concerne essentiellement le style de l'historien et la qualité de son écriture. L'histoire en effet ne doit pas être une simple énumération d'événements, mais un récit à caractère littéraire. Passant rapidement en revue les historiens latins connus de son temps, Antoine constate que la plupart ne sont que des narratores, qui ne font que rapporter platement les faits, alors qu'ils devraient enrichir leur style, afin de donner de la beauté à leur texte et devenir ainsi des exornatores (34). Par la bouche d'Atticus, Cicéron ajoutera même, dans le de Legibus, que l'histoire n'existe pas encore dans la littérature latine (35).

La théorie dans la lettre.

Or que nous montre la lettre que Cicéron rédige sans doute peu de temps avant le de Oratore ?

L'ordre de présentation des faits, l'expression de leurs causes, l'indépendance de l'historien, c'est-à-dire tout ce qui concerne l'aedificatio se trouve déjà assez nettement exprimé :

En effet, depuis le début de la conjuration jusqu'à mon retour il me semble qu'il y a la matière d'un ouvrage d'étendue moyenne, dans lequel tu pourras mettre en œuvre ta science si remarquable des révolutions, qu'il s'agisse d'expliquer les causes des tentatives révolutionnaires ou d'indiquer les remèdes aux maux dont souffre l'État, blâmant ce que tu jugeras condamnable, louant, avec preuves à l'appui, ce qui sera conforme à tes vues (36).

On remarque aussi que la peinture des personnages et la présentation de leur caractère ou de leur vie n'est pas omise et tient même une place importante, car

souvent, il y a dans la destinée variée et mouvementée d'un homme éminent de quoi provoquer étonnement et confiante attente, joie et peine, espoir et crainte (37). [...] Voilà pourquoi tu répondras à mes vœux si tu es disposé à mettre à part de ton grand ouvrage [...] ce que je pourrais appeler le drame de ma vie politique, avec ce que j'y ai fait et subi : il comporte en effet plusieurs actes et une action variée que déterminent concuremment mes résolutions et les circonstances (38).

Cette dernière remarque montre bien cependant que l'accent est mis sur tout ce qui peut contribuer à la beauté et au charme du récit, "car la succession des faits année par année ne nous captive, par elle-même, que médiocrement" (39). Les événements tragiques vécus par Cicéron peuvent être présentés comme une action dramatique ; ils se prêtent à l'expression du pathétique (40), ils peuvent être traités avec "abondance" et "éclat", ils sont de nature à susciter l'émotion et la compassion. On voit qu'il s'agit avant tout de plaire et de toucher, et que la part proprement historique tend en fait à passer au second plan.

Car rien n'est plus propre à procurer du plaisir au lecteur que la variété des circonstances et les vicissitudes de la fortune. […] Il y a, dans la pitié même qu'ils éprouvent, une source de joie (41).

et si l'histoire

s'achève par une belle fin, l'esprit du lecteur éprouve la satisfaction la plus vive et la plus complète (42).

Le fait historique devient de la sorte un fait littéraire, qui dépend moins des événements que du talent de l'auteur. L'exornatio l'emporte sur tout le reste et les fundamenta sont totalement mis à l'écart. Cicéron n'hésite alors ni à le reconnaître, ni à le dire: la nécessité d'embellir le récit pour susciter l'intérêt implique, de la part de l'auteur, une complaisance qui est contraire aux lois de l'histoire et à la vérité :

Je n'hésite donc pas à te prier avec instance d'embellir ce récit au-delà même de ce qui est peut-être ta vraie pensée, et de n'y pas tenir compte des lois de l'histoire, mais de ne pas dédaigner, si elle me recommande avec quelque chaleur auprès de toi, cette complaisance sur laquelle tu as écrit, dans certaine préface, une page exquise, [...] enfin d'accorder à notre amitié un petit peu plus même que ne concédera la vérité (43).

On le voit, la théorie de l'histoire s'efface au miroir de la lettre, et, dans la même année, Cicéron n'écrit pas, pour lui-même à Lucceius, ce qu'il écrit pour les autres dans le de Oratore.

Est-il cependant possible de sauver Cicéron en l'arrachant à cette manifeste et peu flatteuse contradiction ?

Remarquons tout d'abord que la lettre à Lucceius est rnétrique (44), c'est-à-dire qu'elle est destinée à être lue par d'autres que le seul destinataire et peut être rendue publique, comme le prouve la recommandation que l'auteur adresse à son ami Atticus (45). Cicéron ne cherche donc pas à dissimuler ce qu'il demande, et sa requête, pour "qui a une fois passé les bornes de la décence" (46), ne lui semble pas scandaleuse ou déshonorante.

L'orateur ancien consul n'a en effet rien à cacher: dans ce cas particulier, ce qu'il demande en fait à Lucceius c'est d'être plus écrivain (exornator) qu'historien (narrator). Cependant, s'il sait conceptualiser les lois de l'histoire en général, il n'échappe pas pour autant à ce qu'on pourrait appeler les lois naturelles de l'histoire romaine: née à la fois de l'imitation d'une historiographie pathéthique grecque et de l'admiration que le peuple romain se porte à lui-même, l'historia est hagiographique de naissance et toujours plus proche du drame ou de l'épopée que de la stricte vérité. Il faudra les excès julio-claudiens pour qu'avec Tacite elle change de ton, mais elle demeurera toujours éminemment et fondamentalement littéraire.

Vanité, exaltation du moi, conception philosophique, désir de plaire et d'émouvoir, c'est en fait toute l'historiographie républicaine qui se reflète dans la lettre que Cicéron adresse en avril 55 à son ami Lucceius. Miroir d'une âme sans doute, elle est aussi et surtout le miroir d'un genre littéraire.


NOTES

1. Vers le 15 avril 55 plutôt qu'en 56. Voir D.R. Shackleton Bailey, Cicero: Epistulae ad Familiares, 1, Cambridge, 1977, p. 319.

2. Cicéron, Ad Familiares, 5, 12, 2. Pour cette lettre toutes les références renvoient à Cicéron, Correspondance, 2, texte établi et traduit par L.A. Constans, C.U.F., Paris, 1963. La guerre sociale ou guerre des alliés est celle que Rome a soutenue de 90 à 88 contre les Italiens qui réclamaient le droit de cité; la guerre civile qui l'a suivie est celle qui opposa de 88 à 82 les partisans de Marius à ceux de Sylla. Sur Lucceius voir Jean Boes, La philosophie et l'action dans la correspondance de Cicéron, Presses universitaires de Nancy, Nancy 1990, p. 136. Nous donnons en annexe la traduction de L.A. Constans.

3. C'est ce qu'on appelle la "palinodie" de Cicéron. Les triumvirs sont César, Crassus et Pompée.

4. Il achève à cette époque le de Oratore, qui paraît en 55, et songe probablement déjà au de Republica qui paraîtra vers 52.

5. Il doit notamment expliquer la sévérité dont il a fait preuve à l'égard des complices de Catilina. Le thème revient, d'une manière ou d'une autre, dans tous les discours qu'il prononce à cette époque.

6. Cicéron, Ad Familiares, 5, 12, 2.

7. Ibid.

8. Ibid.

9. Id., 6. : in quibus perpetuam rerum gestarum historiam conplecteris.

10. Id., 8.

11. Id., 1 : Genus enim scriptorum tuorum etsi erat semper a me vehementer expectatum, tamen vicit opinionem meam meque ita vel cepit vel incendit, ut cuperem quam celerrume res nostras monimentis commendari tuis.

12. Id., 7. Voir infra, note 22.

13. Id., 2.

14. Apparemment fort satisfait de sa lettre, Cicéron écrira même quelque temps plus tard à son ami Atticus (Ad Att., 4, 6, 4): "Je viens d'adresser à Lucceius une lettre par laquelle je le prie d'écrire l'histoire de mon consulat: tâche d'en obtenir communication, elle est fort belle » (valde bella est).

15. Cicéron considère en effet son consulat et sa lutte contre Catilina comme un des événements majeurs de son temps.

16. Op. cit., 1 : Ardeo cupiditate incredibili neque, ut ego arbitror, reprendenda, nomen ut nostrum scriptis inlustretur et celebretur tuis... Neque enim me solum commemoratio posteritatis ad spem quandam immortalitatis rapit, sed etiam...

17. Op cit., 1 : "Pardonne, je te prie, à mon impatience" (Ignoscas velim huic festinationi meae).

18. Id., 1 : (Neque enim me solum commemoratio posteritatis ad spem quandam immortalitatis rapit, sed etiam) illa cupiditas, ut vel auctoritate testimonii tui vel indicio benevolentiae vel suavitate ingenii vivi perfruamur.

19. ld., 9 : illa nos cupiditas incendit, de qua initio scripsi, festinationis. quod alacres animo sumus, ut et ceteri viventibus nobis ex libris tuis nos cognoscant et nosmet ipsi vivi gloriola nostra perfruamur.

20. Id., 4-5 : "Il y a du plaisir, en effet, à se rappeler, dans la sécurité, les douleurs passées; quant aux autres, qui n'ont pas eu eux-mêmes à souffrir, et qui contemplent simplement sans aucun chagrin personnel, les malheurs d'autrui, pour eux aussi il y a, dans la pitié même qu'ils éprouvent, une source de joie"(Habet enim praeteriti doloris secura recordatio delectationem ; ceteris vero nulla perfunctis proprio molestia, casus autem alienos sine ullo dolore intuentibus etiam ipsa misericordia est jucunda). Sur l'aspect épicurien de cette lettre et ses implications politiques, Jean Boes, op. cit., pp. 138-139.

21. Ce sont les responsables politiques soucieux de l'État et, de facon générale, les hommes vertueux.

22. Id., 7: ...non ingenium mihi solum suppeditatum fuerit tuum, [sicut Timoleonti a Timaeo aut ab Herodoto Themistocli], sed etiam auctoritas clarissimi et spectatissimi viri et in rei publicae maximis gravissimisque causis cogniti atque in primis probati, ut mihi non solum praeconium, quod, cum in Sigeum venisset, Alexander ab Homero Achilli tributum esse dixit, sed etiam grave testimonium impertitum clari hominis magnique videatur. Placet enim Hector ille mihi Naevianus, qui non tantum "laudari" se laetatur, sed addit etiam "a laudato viro".

23. Sur ce point, A. Malissard, "Incendium et ruinae. A propos des villes et des monuments dans les Histoires et les Annales de Tacite", Présence de l'architecture et de l'urbanisme romains. Caesarodunum, 18 bis, 1983, pp. 53-55.

24. Op. cit., 7 : unus enim Xenophontis libellus in eo rege (Agesilas) laudando facile omnes imagines omnium statuasque superavit.

25. Id., 6.

26. Sur Cicéron et l'histoire, M. Rambaud, Cicéron et l'histoire romaine, Paris 1952, pp. 9-18; J.M. André, A. Hus, L'histoire à Rome, Paris 1974, pp.15-23; E. Cizek, Histoire et historiens à Rome dans l'antiquité, Presses universitaires de Lyon, Lyon 1995, pp. 65- 70.

27. Ce sont Cotta, Sulpicius Rufus, Mucius Scaevola et Caesar Strabo.

28. Exposant dans le débat son opinion personnelle, Antoine exprime évidemment celle de Cicéron.

29. De Oratore, 2, 15-63.

30. Id., 62 : Nam quis nescit primam esse historiae legem, ne quid falsi dicere audeat ? deinde ne quid veri non audeat ?

31. Id., 63: Haec scilicet fundamenta nota sunt omnibus.

32. Ibid. : lpsa autem aedificatio posita est in rebus et verbis.

33. Ibid. : hominumque ipsorum non solum res gestae, sed etiam, qui fama ac nomine excellant, de cujusque vita atque natura (explicentur).

34. Id., 54 : "ils ne se sont pas souciés de donner aux faits une forme littéraire : ils se contentent de les raconter" (non exornatores rerum, sed tantummodo narratores fuerunt).

35. De legibus, 1, 5 : "L'histoire est absente de notre littérature" (Abest enim historia litteris nostris).

36. Op. cit., 4 : A principio enim conjurationis usque ad reditum nostrum videtur mihi modicum quoddam corpus confici posse, in quo et illa poteris uti civilium commutationum scientia vel in explicandis causis rerum novarum vel in remediis incommodorum, cum et reprehendes ea quae vituperanda duces et quae placebunt exponendis rationibus comprobabis...

37. Id., 5: At viri saepe excellentis ancipites variique casus habens admirationem, expectationem, laetitiam, molestiam, spem, timorem...

38. Id., 6 : Quo mihi acciderit optatius, si in hac sententia fueris ut a continentibus tuis scriptis ... secernas hanc quasi fabulam rerum eventorumque nostrorum. Habet enim varios actus mutationesque et consiliorum et temporum.

39. Id., 5 : Etenim ordo ipse annalium mediocriter nos retinet.

40. Id., 4 : "Et puis, mes malheurs donneront à ton récit une grande variété qui offre pour l'écrivain un attrait particulier (Multam etiam casus nostri varietatem tibi in scribendo suppeditabunt plenam cujusdam voluptatis).

41. Id., 4-5 : Nihil est enim aptius ad delectationem lectoris quam temporum varietates fortunaeque vicissitudines... Etiam ipsa misericordia est jucunda.

42. Id., 5 : Si vero exitu notabili concluduntur, expletur animus jucundissima lectionis voluptate.

43. Id., 3: ltaque te plane etiam atque etiam rogo ut et ornes ea vehementius etiam quam fortasse sentis, et in eo leges historiae neglegas gratiamque illam, de qua suavissume quodam in prohoemio scripsisti... si me tibi vehementius commendabit, ne aspernere amorique nostro plusculum etiam quam concedet veritas largiare.

44. C'est-à-dire qu'elle comporte des rythmes et des clausules. Voir H. Bomecque, La prose métrique dans la Correspondance de Cicéron, Paris, 1898, p. 19.

45. Supra, note 14. Sur les aspects politiques d'une telle publicité, voir Jean Boes, op. cit., p. 136 et M. Rambaud, op. cit., pp. 17-18.

46. Op. cit., 3.


Article publié dans
G. Haroche-Bouzinac (éd.), Lettre et réflexion morale. La lettre miroir de l'âme, Paris, Klincksieck, 1999, p. 163-171.


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