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LES VOYAGEURS DEVANT LES "MANIÈRES PARTICULIÈRES" DES ÉTRANGERS

L'EXEMPLE DES VOYAGEURS FRANÇAIS EN ITALIE


Lorsque Louis XIV a su que son petit-fils, le duc d'Anjou, allait devenir roi d'Espagne, il lui donna trente-trois conseils. En particulier, il le mit en garde contre la tendance des Français de se rendre odieux en n'ayant que mépris pour les traditions étrangères aux leurs. Il écrit au duc d'Anjou : "Ne paraissez pas choqué des figures extraordinaires que vous trouverez, ne vous en moquez point : chaque pays à ses manières particulières, et vous serez bientôt accoutumé à ce qui vous paraîtra d'abord le plus surprenant."

Montaigne les avait pourtant mis en garde, dans son essai De la vanité : "J'ai honte de voir nos hommes s'effaroucher des formes contraires aux leurs. Où qu'ils aillent, ils se tiennent à leurs façons et abominent les étrangères. Les voilà à condamner tant de mœurs barbares qu'ils voient. Pourquoi non barbares, puisqu'elles ne sont françaises ? […] Le voyager me semble un exercice profitable : l'âme y a une continuelle exercitation à remarquer les choses inconnues et nouvelles, et je ne sache point meilleure école à former la vie que de lui proposer incessamment la diversité et tant d'autres vies, fantaisies et usances et lui faire goûter une si perpétuelle variété de formes de notre nature."

Mais les voyageurs qui découvrirent l'Italie se trouvèrent confrontés à tant de "manières particulières" qu'il eurent tendance à réagir par la moquerie ou par le mépris : "Ils sont fous ces Italiens !". C'est ce que sous-entendent de nombreux textes disséminés dans leurs journaux de voyage.

SPQR : Sono Pazzi Questi Romani !

Fontanges, patins, vertugadins et voiles : étranges ACCOUTREMENTS des Italiennes.
A Venise, dans la plupart des couples mariés, la femme a officiellement un AMANT et le mari une ou plusieurs concubines.
Étranges effets de l'ANGELUS au théâtre et dans une maison de passe.
Le droit d'ASILE permet aux délinquants de s'installer à demeure dans les églises.
A Venise, des femmes ASTROLOGUES révèlent leur avenir aux passants à l'aide d'une sarbacane.
En Sicile seuls les porteurs de BARBE peuvent passer la nuit dans les auberges.
Le BARBIER italien comme maître de cérémonie
À Sienne, en hiver, les femmes en quête d'un amant se servent de BOULES DE NEIGE.
Les CASTRATS sont des hommes qui ont subi dans leur enfance l'ablation des testicules afin qu'ils conservent leur voix de soprano.
Dans les CATACOMBES les cadavres momifiés sont mis en scène
A Naples, le jeu de COCAGNE est un divertissement particulièrement barbare.
Près des CRÈCHES de Noël, les fidèles ont des comportements infantiles, ce dont les jésuites ne manquent pas de tirer quelque profit.
Dans une EXÉCUTION CAPITALE le corps du condammé est publiquement découpé en quatre morceaux.
Pour convaincre les fidèles de la présence du Diable, un prêtre met en scène un EXORCISME.
Etre FAUX-TÉMOIN est en Italie un véritable métier, et plutôt lucratif.
A Sienne, les FILLES À MARIER, rassemblées dans l'église, sont proposées aux hommes qui cherchent une femme.
Une FOIRE AUX FILLES est organisée dans l'église de Minturno.
À Rome, des moines se donnent comme mission d'obtenir et de comptabiliser des INDULGENCES, c'est-à-dire des journées de purgatoire en moins.
A Rome, dans le Mardi-gras, on contraint des JUIFS à courir tout nus le long de la via del Corso.
Étranges moyens utilisés par les Romains pour gagner à la LOTERIE.
Les MESSES ITALIENNES sont très théâtralisées et le comportement des fidèles est aussi très théâtral.
Pas question, pour les Napolitains, de ne pas croire aux MIRACLES que sont les liquéfactions du sang de saint Janvier.
De Bologne à Naples, d'étranges MODES MASCULINES.
De l'utilisation d'un MOINE-ÉTALON pour perpétuer la famille.
L'exposition du corps du défunt lors des OBSÈQUES.
"Faire ses PÂQUES" est, en Italie, une formalité obligatoire
Les cérémonies des obsèques commencent par l'intervention de PLEUREUSES dont le rôle est de simuler la douleur.
Entre Noël et l'Epiphanie, on organise le PRÊCHE DES ENFANTS, qui se relaient dans l'église pour réciter des prêches qu'is ont appris par cœur.
Sur les place des villes, des moines PRÉDICATEURS se mêlent aux bateleurs.
150 écus permettent d'acquérir une épouse ou une concubine, PUCELAGE garanti.
Les couvents de RELIGIEUSES sont des réserves de belles filles pour les ecclésiastiques.
L'une des joies de voyageurs était de faire l'inventaire des RELIQUES les plus improbables conservées dans les églises de ROME.
À VENISE étaient conservées des quantités de fausses RELIQUES
Les processions de la SEMAINE SAINTE
L'usage était que les prêtres transforment leur SERMON DE PÂQUES en bouffonnerie.
Les SERMONS À L'ITALIENNE sont avant tout des spectacles que donne le prédicateur, avec force cris, gestes et mimiques.
Un prêtre en lutte contre le SEXE DES ANGES
Dans presque toute l'Italie les femmes mariées ont leur SIGISBÉE, c'est-à-dire un chevalier servant qui les entoure de soins assidus.
Les Italiens ne s'expriment pas d'une manière naturelle, mais avec emphase et surconsommation de SUPERLATIFS.
Au THEÂTRE, à l'opéra, l'attitude du public rend le spectacle presque inaudible.
Diverses manières d'exercer sa VENGEANCE contre un ennemi.

 


OUVRAGES UTILISÉS :

• Audebert (Nicolas), Le Voyage et observations de plusieurs choses diverses qui se peuvent remarquer en Italie […], deuxième partie, éd. Paris-Clouzier, 1656.

• Berlioz (Hector), Mémoires comprenant ses voyages en Italie, en Allemagne, en Russie et en Angleterre, 1803-1865, t. I, éd. Paris-Calmann-Lévy, s.d.

• Bouchard (Jean-Jacques), Journal, II, Voyage dans le royaume de Naples. Voyage dans la campagne de Rome, Turin-Giappichelli, 1977.

• Breton (J.B.J.) [de La Martinière], Voyage en Piémont […], éd. Paris, 1803, p. 177.

• Caylus (Comte de), Voyage d'Italie, 1714-1715, éd. Paris-Fischbacher, 1914.

• De Brosses (Charles), Le président De Brosses en Italie. Lettres familières écrites d'Italie en 1739 et 1740, 2e éd., Paris-Didier, t. I, 1858.

• De Brosses (Charles), Le président De Brosses en Italie. Lettres familières écrites d'Italie en 1739 et 1740, 2e éd., Paris-Didier, t. II, 1858.

• De Brosses (Charles), L'Italie il y a cent ans ou Lettres écrites d'Italie à quelques amis en 1739 et 1740, t. II, Paris-Levavasseur, 1836.

• De Brosses (Charles), Nouveau voyage d'Italie, 2e partie.

• De La Lande, Voyage en Italie […], 3e éd.,t. V, Genève, 1790.

• De La Platière (Roland), Lettres écrites de Suisse, d'Italie, de Sicile et de Malthe […] en 1776, 1777 et 1778, t. II, éd. Amsterdam, 1780.

• D'Emiliane (Gabriel), Histoire des tromperies des prêtres et des moines décrite dans un voyage d'Italie, 3e éd., t. II, Rotterdam-Acher, 1702.

• D'Emiliane (Gabriel), Histoire des tromperies des prêtres et des moines décrite dans un voyage d'Italie […], 6e éd., t. I, Rotterdam-Acher, 1719.

• D'Emiliane (Gabriel), Histoire des tromperies des prêtres et des moines décrite dans un voyage d'Italie […], 6e éd., t. II, Rotterdam-Acher, 1719.

• Duclos (Charles), Voyage en Italie ou Considérations sur l'Italie, éd. Maestricht-Roux, 1793.

• Dumas (Alexandre), Le Spéronare, Le Capitaine Aréna, Le Corricolo, Oeuvres complètes

• Du Mont (Jean), Voyages en France, en Italie, en Allemagne, à Malthe et en Turquie […], t. IV, La Haye-Foulque, 1699.

• Du Val (P.), Le Voyage et la description d'Italie […] divisé en deux parties, Paris-Clouzier, 1656.

• Gautier (Théophile), Voyage en Italie, Italia, éd. Paris-Charpentier, 1879.

• Goudar (Ange), L'Espion chinois ou l'envoyé secret de la cour de Pékin pour examiner l'état présent de l'Europe, traduit du chinois, t. III, Cologne, 1765.

• Grangier de Liverdis (Balthazar), Journal d'un voyage de France et d'Italie, sept. 1660 - mai 1661, Paris-Vaugon, 1667.

• Guyot de Merville (Michel), Voyage historique d'Italie […], t. I, éd. La Haye-De Merville, 1729.

• Guyot de Merville (Michel), Voyage historique d'Italie […], t. II, éd. La Haye-De Merville, 1729.

• Jordan (Claude), Voyages historiques de l'Europe, t. III, qui comprend tout ce qu'il y a de plus curieux en Italie, Paris-Le Gras, 1693.

• Jouvin De Rochefort (Albert), Voyage d'Italie et de Malthe, 1712.

• Kauffmann (A. Sébastien), Chroniques de Rome, tableau de la société romaine sous le pontificat de Pie IX, éd. Paris-Barba, 1865.

• Labat (Jean-Baptiste), Voyages […] en Espagne et en Italie, tome II, Paris-Delespine, 1730.

• Labat (Jean-Baptiste), Voyages […] en Espagne et en Italie, t. III, Paris-Delespine, 1730.

• Labat (Jean-Baptiste), Voyages […] en Espagne et en Italie, t. IV, Amsterdam, 1731.

• Limojon (Alexandre-Toussaint de), La ville et la république de Venise, t. III, Paris-De Luyne, 1680.

• Maupassant (Guy de), La Vie errante, éd. Paris-Ollendorff, 1890.

• Misson (Maximilien), Voyage d'Italie […], 5e édition, t. I, éd. Utrecht, 1722.

• Misson (Maximilien), Voyage d'Italie, t. I, éd. Amsterdam, 1743.

• Misson (Maximilien), Nouveau Voyage d'Italie […], 3e éd., t. II, La Haye, 1698.

• Misson (Maximilien), Nouveau Voyage d'Italie […], 5e édition, t. II, La Haye, 1731.

• Montaigne (Michel de), Journal du voyage en Italie, éd. Rome, 1774, t. II.

• Montesquieu, Voyages de Montesquieu publiés par le baron Albert de Montesquieu, Bordeaux, 1896.

• Renan (Ernest), Lettre à Adolphe Garnier, 1850.

• Rogissart (Alexandre de), Les Délices de l'Italie, t. II, éd. Leyde, 1706.

• Roland de La Platière (Jean-Marie), Lettres écrites de Suisse, d'Italie, de Sicile et de Malthe en 1776, 1777 et 1778, t. II, Amsterdam, 1780.

• Sade (Donatien Alphonse François de), Voyage d'Italie, dans Oeuvres complètes, t.VII, Paris, Pauvert, 1965.

• Stendhal, Pages d'Italie, éd. Le Divan, 1932, p. 265-266.

• Stendhal, Promenades dans Rome, t. I, éd. Le Divan, Firenze.

• Stendhal, Rome, Naples et Florence en 1817, éd. Paris-Delaunay, 1817.

• Taine (Hippolyte), Voyage en Italie, t. I, À Rome, éd. Complexe, 1990.

• Taine (Hippolyte), Voyage en Italie, t. III, À Venise, éd. Complexe, 1990.

• Villamont (Jacques de), Les voyages du seigneur de Villamont, divisés en trois livres... Le premier contient la description des villes et forteresses de l'Italie et des antiquités et choses saintes et modernes qui s'y voient, t. I, Rouen, Daré, 1607.


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